• Tout est permis

     Un très joli documentaire que tout le monde devrait voir. Surtout ceux qui ont tendance à rouler trop vite... Même si on peut regretter quelques longueurs en fin du documentaire, c'est bien film.

    scénario: 18/20    technique: 16/20   note finale: 16/20

    Tout est permis

    Le permis de conduire à points est instauré depuis plus de 20 ans.
    Véritables lieux de mixité sociale et culturelle, les stages de récupération de points sont l’occasion pour les auteurs d'infractions d’y exprimer leur révolte mais aussi de se raconter.
    Les nombreux témoignages et images recueillis par Coline Serreau lors de ces stages, dressent un portrait tragi-comique de notre société où l’individualisme et les petites habitudes de chacun mettent en péril le bonheur de tous.
    Portrait à charge, mais regard complice, TOUT EST PERMIS est un film réalisé aux quatre coins de l’Hexagone.

    On rappelle toujours, en parlant de Coline Serreau, l'immense succès de Trois hommes et un couffin, mais il faudrait revoir aujourd'hui son formidable premier film, qui était déjà un documentaire, Mais qu'est-ce qu'elles veulent ? Pour mesurer à quel point, dès ses premiers pas de réalisatrice, elle posait des questions dont la pertinence ne s'est jamais démentie. Depuis, elle n'a jamais cessé, avec un bel humour et une furieuse vitalité, de plaider pour la perfectibilité d'une société, la nôtre, qui a bien trop tendance à se laisser entraîner par des penchants nocifs pour l'individu comme pour le collectif… suggérant, inlassable optimiste, que des réponses sont possibles pourvu qu'on se pose quelques bonnes questions.
    Tous ses films ont été programmés dans les salles Utopia, le dernier en date étant Solutions locales pour désordre global… et son petit nouveau est de la même veine : intelligent, généreux, drôle mais sans méchanceté, même quand il met en relief la bonne dose de connerie que les humains se trimballent, capables par leur indécrottable individualisme de nuire en toute inconscience, et donc sans la moindre culpabilité, à leurs proches comme à la planète entière.

    Il n'y avait pas meilleur choix pour traquer l'expression la plus obstinée de l'individualisme le plus dévastateur que de s'intéresser à « la France au volant » titre premier du film devenu depuis celui que vous savez, en référence à l'arrivée du « permis à point » en 1992, et c'est fou ce qu'on apprend sur la nature humaine en se baladant au quatre coins de l'hexagone à travers les stages de « récupération de points ». Ils sont de tous milieux, de tous sexes (une majorité d'hommes), de tous âges, de toutes catégories socio-professionnelles et ils racontent pourquoi ils sont là, comment ils voient les choses et il faut beaucoup de patience, de pédagogie aux animateurs des stages pour introduire un peu de lucidité altruiste dans des visions parfois bien stratifiées.
    Il y a les habitués des sessions de rattrapage, et ceux qui découvrent, celui qui affiche plusieurs Ferrarri et le fauché qui roule dans une vieille Clio… L'un avoue en se marrant « quand je suis au volant, je suis le roi de la route », quand ils parlent bagnole ils roulent des regards en forme de roubignoles et reconnaissent rarement qu'ils ont peut-être eu un peu tort d'être allés trop vite, d'avoir accéléré à l'orange, d'avoir grillé une priorité… Ils considèrent que les radars sont une pompe à fric et ne se sont pas concernés par les consignes de prudence. La plupart ne se sentent pas responsables, mais plutôt victimes d'un système devenu à leur goût trop répressif. D'ailleurs ils conduisent parfaitement : « les autres font plus d'erreurs que moi ». Les nanas présentes ne sont pas en reste, et ils ne sont pas nombreux ceux qui font profil bas. « On m'a rendu mon permis à 10h, à 10h20, je me suis fait gauler sur l'autoroute » et les autres de rigoler, presque fiers de se montrer aussi réfractaires à tout ce qui pourrait les empêcher de n'en faire qu'à leur tête, sans aucune considération pour ceux qui partagent les mêmes routes qu'eux.

    Tout ça est très marrant, mais aussi très inquiétant… On se rassurera en se disant qu'il y a tous les autres, ceux qui ne sont pas dans le film, ceux qui n'ont pas besoin de faire des stages de récupération de points… et pas seulement parce qu'ils avaient repéré les radars ou eu beaucoup de chance… Il y a aussi ceux qui ne sont déjà plus en mesure de participer aux stages, car, on peut le rappeler ici, la voiture tue cent millions de fois plus que le terrorisme qui pourtant occupe une bonne place dans les « stratégies de la peur »… 78 % des Français disent avoir peur du terrorisme dans un récent sondage, mais se sentent en sécurité au volant de leur belle auto. Cherchez l'erreur…


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