• Le théorème de Marguerite

    Une pure merveille. Je ne sais pas comment vous expliquer mais tout est génial dans ce petit film sans prétention.

    Le théorème de Marguerite

    L'avenir de Marguerite, brillante élève en Mathématiques à l'ENS, semble tout tracé. Seule fille de sa promo, elle termine une thèse qu’elle doit exposer devant un parterre de chercheurs. Le jour J, une erreur bouscule toutes ses certitudes et l’édifice s’effondre. Marguerite décide de tout quitter pour tout recommencer.

    Mettre de l’ordre dans l’infini, c’est l’obsession qui hante Marguerite depuis son enfance. La voici aujourd’hui brillante chercheuse à l’École Normale Supérieure, totalement absorbée par sa thèse sur la conjecture de Goldbach, l’un des plus anciens problèmes non résolus des mathématiques. Interviewée par une journaliste, son discours passionné laisse percevoir à quel point Marguerite, incarnée avec justesse par Ella Rumpf, semble avoir trouvé la foi dans ce champ scientifique. Gauche et malhabile dans ses chaussons, les épaules rentrées, presque terne, elle apparaît d’emblée en décalage avec le reste du monde, évoquant une jeune novice au couvent… Par contre, en posture de démonstration mathématique, elle irradie, elle raisonne avec élégance et effervescence, suscitant l’admiration de ses collègues et de son directeur de thèse, interprété par un inhabituel et ambigu Jean-Pierre Darroussin.



    Mais à l’occasion de la présentation de ses travaux, s’annonçant comme sa première consécration devant un auditoire hautement spécialisé, un nouvel étudiant, aussi talentueux qu’elle, remet en question tout ce en quoi elle croyait. Ses certitudes s’écroulent en un instant. Et le ciel lui tombe une seconde fois sur la tête lorsqu’elle se sent trahie par son directeur « mentor », qui la lâche, argumentant que « les mathématiques ne doivent souffrir d’aucun sentiment. » Dans la vie comme dans la recherche, les erreurs font souvent avancer plus que les certitudes. C’est ce que va expérimenter Marguerite qui, pour se relever de cette chute, se confrontera à une nouvelle équation dans laquelle la quête de vérité mathématique devra laisser l’espace à la quête de vérité intime. Car on se doute bien que le look austère de Marguerite cache des douleurs muettes…
    Notre héroïne entame alors un nouveau parcours initiatique ponctué de rencontres déterminantes, qui lui permettront de sortir du cadre, d’élargir les possibles… Mais une constante s’affirme cependant : Marguerite continue de décrypter le monde en phrases mathématiques. Et malgré son erreur, elle ne peut se détacher de sa quête du Graal : la résolution de la conjecture de Goldbach…
    C’est sur le registre de la traduction du langage mathématique en langage cinématographique et poétique que le film s’avère le plus original. Les lignes de raisonnement et équations abstraites (et véridiques) se projettent sur les murs transformés en tableau noir, telles des hiéroglyphes indéchiffrables pour le commun des mortels.

    « Il y a un vrai parallèle à faire entre les mathématiques et la création artistique. Ce qui relie les maths et la réalisation, c’est le risque et la passion qui font que nous sommes parfois prêts à travailler des années sans savoir si notre travail va trouver une issue. », confie Anna Novion. Dans son troisième long-métrage (après les très beaux Les Grandes personnes, 2007, et Rendez-vous à Kiruna, 2013), elle nous offre une sorte de comédie romantique surprenante, qui montre aussi la ténacité quasi surhumaine dont doit faire preuve une jeune femme pour se faire une place dans la course à l’excellence, pour survivre dans un microcosme scientifique majoritairement masculin où la concurrence fait rage. Pour avancer dans son labyrinthe et s’accomplir, Marguerite devra faire la part entre les empêchements liés aux figures du pouvoir du système et ses propres blocages personnels. Le Théorème de Marguerite laisse entendre que toute quête de vérité passe par la pertinence du point de vue, que ce soit en sciences, en amour ou en cinéma…
    Un film qui saura séduire les plus réfractaires au théorème de Pythagore comme il enchantera les experts en la matière, qui y trouveront peut-être des éléments pour démontrer Goldbach, encore irrésolu à ce jour ! Dont cette hypothèse : le désordre amoureux ne serait-il pas le meilleur moteur pour résoudre le problème mathématique qui consiste à mettre de l’ordre dans l’infini ?


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