• Entre les lignes

     Un très joli film que je vous recommande.

    Entre les lignes

    Angleterre, 1924. Femme de chambre chez un couple d'aristocrates, Jane fréquente secrètement Paul, le fils des propriétaires du manoir voisin. Instinctivement, Jane sait que leur différence de milieu, et le futur mariage de Paul avec une autre, vouent leur liaison passionnée à l'échec. Elle se raccroche alors à ces étreintes dérobées comme à autant de futurs souvenirs destinés à nourrir sa plume d'écrivaine en devenir.

    Nous voilà plongés en ce jour du 30 mars 1924, journée de la fête des mères, dans le quotidien de Jane, jeune femme de chambre chez un couple d’aristocrates, les Niven. Suite à un coup de téléphone auquel Jane répond évasivement bien qu’avec un certain plaisir, nous comprenons qu’elle entretient une relation avec un jeune homme du village. Pas n’importe quel jeune homme puisqu’il s’agit de Paul Sheringham, le fils des propriétaires du manoir voisin, amis de ses employeurs.
    La majeure partie du film se déroule ainsi durant cette journée, lors de moments volés d’intimité entre Jane et Paul. Il apparaît alors que ces deux-là entretiennent une histoire d’amour depuis quelques années malgré la différence de classe qui les sépare. Le fait que Paul soit fiancé à une femme de sa condition – qui était au départ promise au frère aîné de Paul, mort à la guerre – n’a pu mettre fin à cette liaison passionnée.

    Tout dans ce film placé sous le signe de l’empathie se rapporte aux émotions viscérales non seulement chez nos deux amoureux mais également chez ceux qui les entourent. Émotions qui peuvent ressurgir à tout moment sans crier gare. Cette frontière entre la vulnérabilité et l’intimité entre deux êtres est tout simplement fascinante. La réalisatrice, Eva Husson, se demande alors : comment survit-on ? La vie est violente et tragique, alors comment continue-t-on à créer, comment continue-t-on à rire et aimer, en dépit de tout ? Car si l’histoire d’amour est centrale lors de cette première partie, des sauts dans l’avenir, vers la fin des années quarante puis dans les années quatre-vingt, nous apprennent que Jane est devenue écrivaine, en train d’écrire son premier roman, puis autrice reconnue et célébrée. Lorsque le personnage de Jane âgée se rappelle le jour qui a bouleversé sa vie, sa mémoire fait des digressions inattendues. Il en va de même dans le film qui a une structure temporelle non-linéaire : nous nous déplaçons dans le temps avec Jane au travers d’une image ou d’un mot, de tout ce qui peut lui évoquer un souvenir.
    Ses étreintes dérobées avec Paul en 1924 seront donc de futurs souvenirs destinés à nourrir sa plume d’écrivaine. Mais ces moments intimes marquent aussi son affirmation, qui passe par l’appropriation de sa nudité : en ce dimanche des mères, Jane passe non seulement la matinée avec son amant, mais après son départ pour le repas mondain où il doit retrouver sa fiancée, elle se promène dans le manoir, nue, parenthèse de liberté totale pour une jeune femme qui, jusque-là, a passé la majeure partie de sa vie au service des autres. Elle n’est plus alors une inférieure dévouée au bon vouloir des mieux nés, mais une créatrice de monde, une amoureuse des mots depuis toujours qui se rêve plus grande. Nous assistons ainsi à l’émergence d’une personnalité hors du commun, au bourgeonnement de son imagination, à l’affirmation d’un talent qui va la mener bien loin de sa condition de domestique.

    Laissez-vous emporter par ce voyage dans le temps, dans les émotions et les souvenirs, dans cette période de l’après Première Guerre mondiale où des familles endeuillées doivent surmonter la perte intolérable de leurs garçons. Laissez Jane vous confier un secret qu’elle ne confiera jamais à personne, pas même aux personnes de sa vie, et devenez ce confident dont elle a besoin.


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