• Les témoins de Lendsdorf

    Encore une merveille! On reste en haleine jusqu'au bout. "Les Témoins de Lendsdorf" nous rappelle qu’un film, quand il est réussi, est toujours symbolique, qu’il réunit l’image et l’idée, que l’une ne va jamais sans l’autre. Dans les champs ou les salles d’archives, l’investigation en question relève de l’archéologie mémorielle... Mais on est littéralement happé par ce travail austère et dérangeant, d’autant que l’obsessionnelle enquête de Yoel bifurque vers un questionnement identitaire assez inattendu. Et vertigineux. Amichai Greenberg, dont c'est le premier long métrage, fait preuve d'une grande efficacité narrative et d'un vrai sens du rythme. Sa mise en scène séduit, tandis que la complexité de son propos satisfait les cinéphiles les plus exigeants. Le réalisateur israélien Amichai Greenberg adopte la forme du thriller pour mettre en lumière le massacre de Rechnitz, en Autriche, en 1945 et les questionnements d’un historien sur son identité juive. Et c'est une totale réussite.

    scénario: 18/20      acteurs: 18/20   technique: 18/20    note finale: 18/20

    Les témoins de Lendsdorf

    Yoel est un historien juif orthodoxe, chargé de la conservation des lieux de mémoire liés à la Shoah. Depuis des années, il enquête sur un massacre qui aurait eu lieu dans le village de Lendsdorf en Autriche, au crépuscule de la Seconde Guerre Mondiale. Jusqu’ici patientes et monacales, ses recherches s’accélèrent lorsqu’il se voit assigner un ultimatum : faute de preuves tangibles des faits, le site sera bétonné sous quinzaine…

    Le propre de l'homme, c'est l'oubli…
    Yael est un historien juif orthodoxe qui enquête depuis des années sur une question qui l'obsède : où donc sont enfouies les victimes d'un massacre de Juifs qui a eu lieu à la fin de la seconde guerre mondiale à Lendsdorf, au cœur de l'Autriche ? Ses recherches jusqu'alors solitaires et silencieuses prennent brutalement un coup d'accélérateur à cause de l'ultimatum donné par les responsables d'un projet immobilier qui doit s'implanter sur ce qu'il suppose être l'endroit où sont enterrées les victimes : impossible de geler indéfiniment toute construction. Faute de preuves tangibles du massacre, le site sera bétonné sous quinze jours.

    Yael s'immerge alors plus intensément dans les archives, se rend sur les lieux supposés du carnage, s'acharne à retrouver les témoins encore vivants, les presse de questions… C'est comme un thriller, la quête obsessionnelle et tourmentée d'une vérité qui se dérobe sans cesse : il y a ceux qui ont oublié, ceux qui veulent oublier, ceux qui se taisent et Yael se cogne contre le vide du silence tandis que cette histoire qu'il n'a pas vécue l'affecte au plus profond de lui même, comme s'il avait absolument besoin de savoir pour pouvoir vivre sereinement. « La question de la Shoah est un élément intense et lourd de la vie de la communauté juive , dit Amichaï Greenberg, même aujourd'hui… » Comment et pourquoi cette nécessité de transmettre la mémoire de la Shoah alors même qu'on ne l'a pas vécue ? L'histoire de ceux qui nous ont précédé a-t-elle un si grand rôle sur ce que nous sommes…
    Cette quête que Yael menait, croyait-il, avec des motivations religieuses, culturelles, idéologiques, va pourtant prendre un tour inattendu en le confrontant à l'histoire de sa propre famille, une histoire occultée par sa mère et qui le renvoie tout à coup à sa propre identité. La vérité est-elle toujours bonne à dire, en quoi nous aide-t-elle à vivre ? Cette mise à nu d'une histoire familiale enfouie va avoir des conséquences dans sa relation à ses proches, à son neveu à particulier… L'oubli serait-il parfois un remède à la douleur et le silence une nécessité pour arriver à survivre ? Le véritable mystère qui alimente alors l'intrigue semble être moins celui du lieu où sont enfouis les disparus que les mensonges de sa propre mère.

    The Testament (traduction anglaise du titre original) est inspiré du massacre de Rechnitz en Autriche. Dans ce petit village, 600 Juifs sont condamnés à des travaux forcés. Dans la nuit du 24 au 25 août 1945, peu de temps avant l'arrivée de l'Armée Rouge, une grande fête à laquelle participe la nomenklatura nazie est donnée dans un château voisin du camp des prisonniers. Pendant que la fête bat son plein, les officiers allemands distribuent des armes aux invités qui massacrent alors près de 200 Juifs.
    Ce ne fut pas un cas isolé dans la région, où on achevait les prisonniers trop épuisés pour marcher. Mais dans ce cas précis, on ne retrouvera jamais les corps des victimes, les habitants de Rechnitz s'enfermant dans un mutisme obstiné, scellé au fil du temps par la disparition des témoins.


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