• Coeurs ennemis

    Ce film est une pure merveille où tout est réussi: le scénario, les dialogues, les décors, les costumes. les acteurs sont au commet de leur art et c'est divinement filmé. James Kent est un grand réalisateur! Keira Knightley vibre dans Cœurs ennemis de James Kent. Il y avait longtemps que la comédienne n’avait pas été aussi bouleversante que dans le rôle de cette Anglaise attirée par un Allemand à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Un vrai mélo, dans la grande tradition du genre, dont les résonances troubles font écho à la situation historique où évoluent les personnages, et que porte une Keira Knightley qu’on dirait sortie d’un film de Douglas Sirk. Une adaptation bouleversante du best-seller de Rhidian Brook, qui ne masque ni la douleur ni la cruauté des personnages. Au-delà de la romance élégante et classique, ce film aborde intelligemment la dénazification dans une Allemagne dévastée par la guerre et les ravages sur un couple de la mort d’un enfant.

    scénario: 18/20      acteurs: 19/20   technique: 20/20   note finale: 189/20

    Coeurs ennemis

    Hambourg, 1946. Au sortir de la guerre, Rachel rejoint son mari Lewis, officier anglais en charge de la reconstruction de la ville dévastée. En emménageant dans leur nouvelle demeure, elle découvre qu'ils devront cohabiter avec les anciens propriétaires, un architecte allemand et sa fille. Alors que cette promiscuité forcée avec l'ennemi révolte Rachel, la haine larvée et la méfiance laissent bientôt place chez la jeune femme à un sentiment plus troublant encore.

    Cœurs ennemis, le titre annonce la couleur et le ton de cet ample film romantique et historique qui se déguste comme on dévore un best-seller. C'est d'ailleurs l'adaptation d'un roman à succès, de grande qualité, la preuve : il est publié dans l'excellente collection de poche 10/18. Au programme donc : un contexte historique terrible, deux personnages que tout oppose, appartenant à deux camps ennemis, qui vont se rapprocher au prix d'une lutte intérieure contre leurs préjugés.

    Nous sommes en 1946. La jeune Rachel arrive à Hambourg, totalement dévastée quelques mois auparavant par l'aviation alliée. Elle vient y rejoindre Lewis, son mari, officier supérieur britannique en charge de la reconstruction et de la pacification de la ville, tache titanesque. Comme c'était souvent le cas, le couple est logé dans une maison – splendide, au bord de l'Elbe – réquisitionnée à des Allemands : l'architecte Lubert qui vit là avec sa fille Frida et une domestique. Au grand dam de Rachel, qui goûte peu la fréquentation des ennemis vaincus, Lewis, refusant d'en rajouter dans l'humiliation, a choisi de ne pas expulser les propriétaires, leur proposant une cohabitation.


    On comprend vite que Rachel et Lubert partagent une blessure liée à la perte d'un être cher : elle la mort de son enfant décédé dans les bombardements de Londres, lui celle de sa femme lors de l'offensive des alliés. Et malgré les réticences premières de la jeune femme, c'est sans doute cette blessure commune qui va, sinon provoquer, en tout cas accentuer leur attirance réciproque autant qu'interdite. Lewis, lui, est trop occupé pour remarquer quoi que ce soit…
    L'intrigue est donc on ne peut plus classique mais elle est très bien menée et le film vaut surtout par son ambiance, la qualité de sa reconstitution historique d'une période peu représentée à l'écran, la richesse des personnages et l'excellence du jeu des comédiens. Keira Knightley – rodée aux grands rôles historiques : Orgueil et préjugés, Anna Karénine, The Duchess, Colette tout récemment – incarne avec brio toutes les facettes de cette femme, mère inconsolable, envahie par une inextinguible colère face à la mort de son enfant, épouse aimante mais déçue qui lutte contre un sentiment interdit, maîtresse passionnée et sensuelle. Face à elle, les deux hommes sont également riches en complexité, autant l'acteur australien Jason Clarke en mari solide et profondément bon que le troublant Alexander Skarsgard, qui personnifie à lui seul l’ambiguïté et la souffrance des élites allemandes vaincues et brisées.

    La reconstitution louée plus haut rend bien compte de la dévastation de Hambourg (les bombardements alliés ont fait probablement 100000 morts dans la ville) et du chaos qui a suivi, avec son lot de pénurie alimentaire et de maladies. Quant au scénario, il décrit parfaitement la complexité de la situation. Car évidemment l'Allemagne mit énormément de temps à tourner la page et, face à l'ampleur du chaos et du fort ressentiment envers ceux qui étaient considérés comme les occupants, perdura un reliquat de résistance nazie (ceux qu'on appelait les « werewolf », auteurs d'attentats contre les forces alliées), représentée dans le film par le petit ami de Frida, la fille de Lubert. Le film a ainsi une réelle valeur historique et son récit palpitant fait oublier les réserves que peuvent susciter ses allures de bluette romantique.


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